Graffitis, tags : pour ou contre ?
L'une adore, l'autre déteste ! Et moi alors ?
Réponse de Normand ... toulousain : ni pour, ni contre, en bon photographe (hum ...) je constate et enregistre les manifestations de qualités très inégales d'un phénomène de société.
Le fait de s'exprimer sur tout support public n'est pas nouveau ; les coeurs gravés transpercés d'une flèche type "A mon Loulou pour la vie" ne datent pas d'aujourd'hui : ce sont des graffitis du grec graphein "écrire", mots, textes ou dessins tracés ou gravés sur les murs, les arbres, les monuments, voire dans les toilettes !
Nos ancêtres du néolithique furent des précursseurs plus discrets de cet art, dit "pariétal", laissant sur les parois de leurs cavernes des témoignages précieux et émouvants, essentiellement la faune de leur temps en l'absence de tous signes abstraits préfigurant l'amorce d'une écriture codifiée.
Graffiti : chapelle en ruine de Vernègues
Graffiti : quartier du Panier à Marseille (2012)
Les tags, mot d'origine anglaise, sont à leur début des signatures codées, dessinées dans un but décoratif. L'apparition des bombes de peinture a permis à cet "art populaire" de se libérer et de coloniser, à tort ou à raison, l'espace public : bâtiments, palissades, wagons, friches industrielles et parfois supports dédiés où s'expriment, souvent en toute illégalité, barbouilleurs et vrais artistes.
Signature : quartier du Panier à Marseille (2006)
Wagon réformé en gare de triage de Sotteville-lès-Rouen (2007)
Pochoir : quartier du Panier à Marseille (2012)
Porte de garage à Avignon (2007)
Le pire ... à Antibes, rempart face au musée d'archéologie marine (2007)
... et le meilleur à Mostar en Bosnie Herzégovine (2005)
Le trompe-l'oeil ne serait-il pas l'ancêtre des tags ? Destiné à "habiller" les façades aveugles de certains immeubles avec un décor réaliste, le trompe-l'oeil s'apparente davantage à une fresque par sa technique de réalisation et sa volonté de s'intégrer naturellement au support et à son environnement. Les grandes surfaces mises en oeuvre par l'artiste, en concertation avec le propriétaire et les autorités, sont sans commune mesure avec les tags qui, hors certains emplacements dédiés, sont réalisés dans l'illégalité et donc appelés à disparaître rapidement, risque assumé par les tagueurs conscients de l'aspect éphémère de leurs oeuvres.
Trompe-l'oeil à l'Isle-sur-Sorgue (2012)
Le tatouage ne serait-il pas, lui, l'ancêtre du graffiti ? La technique et son usage sont je pense vieux comme le monde ; on a retrouvé sur des peaux humaines momofiées des motifs qui pourraient être des tatouages d'identification à un groupe ou de croyance en une divinité, notamment chez les aztèques et les mayas.
La recrudescence des personnes tatouées, sans distinction de classe sociale, semble correspondre à celle des graffitis : indélébiles chez les premières, éphémères chez les seconds, une volonté de s'afficher ou d'afficher sa différence à vie dans sa propre chair ou dans l'espace public.